Les phénomènes de retrait et de gonflement du sol sont des risques naturels qui concernent un cinquième du territoire métropolitain. Inclus dans l’ERSIS, ces risques ne doivent pas être minorés avant l’achat d’un terrain à bâtir ou d’une maison ancienne voire un achat en VEFA (Vente en État de Futur Achèvement) . Plus de 4 millions de maisons actuellement construites sont déjà potentiellement exposées au risque de retrait-gonflement des argiles qui, s’il ne cause pas de victimes humaines, demeure une menace importante pour toute construction. 20 % des arrêtés de catastrophe naturelle s’appliquent au retrait-gonflement des sols qui induit près de 40 % des coûts d’indemnisation des assurances habitation. Le retrait-gonflement des sols est donc un élément majeur à prendre en compte dans la lecture d’un ESRIS(État des Servitudes Risques et Information sur les Sols) avant un achat immobilier.
Un risque naturel progressif et lent
Par rapport à d’autres risques naturels listés dans l’ESRIS obligatoire avant la vente ou la location d’un bien immobilier, le phénomène de retrait et/ou gonflement des sols est un phénomène lent qui est inclus dans la nature du terrain quel que soit son environnement.
Alors que la plupart des autres risques naturels comme les inondations, les crues, les incendies de forêt… sont ponctuels et peuvent être en partie prévenus (digues, réservoirs, débroussaillage…), le phénomène de retrait-gonflement des sols est installé dans le sous-sol avant même que le terrain soit déclaré constructible ou construit. C’est la nature géologique du sol et du sous-sol qui influe en premier sur sa capacité à se rétracter ou à gonfler au fur et à mesure des épisodes de sécheresse et de pluies abondantes. Plus que la présence de nappes phréatiques en sous-sol, c’est la composition du terrain qui est la principale cause de ces mouvements de retrait et de gonflement en raison notamment de sa teneur en argiles.
Les argiles sont les particules minérales les plus fines des sols, les plus à même de varier de volume en fonction de leur teneur en eau. En période de sécheresse, lorsque l’eau s’évapore du sol, les argiles se rétractent (tassement et affaissement du terrain) pour se regonfler par réhydratation après de très fortes pluies. On distingue d’ailleurs parmi les argiles certaines qualifiées de ‘gonflantes’. Parmi celles-ci on note les smectites, les argiles interstratifiées, les vermiculites et certaines chlorites toutes largement répandues sur notre territoire.
Nota : Le phénomène d’alternance de retrait suivi de gonflement des sols s’accentue lorsque la circulation de l’eau dans le sol est perturbée. Ces perturbations pouvant bien évidemment être déclenchées par des activités humaines de drainage ou pompage, les plantations, l’imperméabilisation en surface (routes, espaces goudronnés…) mais aussi lors de fuites sur des canalisations enterrées. Bien évidemment, les épisodes plus fréquents de canicules et de sécheresses en raison du changement climatique sont propices à l’augmentation de la fréquence et de la durée des épisodes de retrait des sols desséchés.
Un danger grave pour plus de 4 millions de maisons individuelles
La déformation progressive du sol et/ou du sous-sol est la cause de désordres dans les bâtiments notamment par la fissuration des éléments porteurs. Ce sont principalement les structures légères et donc les maisons individuelles qui sont les plus vulnérables en raison de leurs fondations généralement superficielles et de leurs structures sous-dimensionnées ou du moins ne prenant en compte cet aléa (hors zones de construction parasismique).
On recense environ 4,3 millions de maisons individuelles construites dans des zones en aléa de retrait-gonflement des sols qualifié de fort à moyen (soit 23 % de l’habitat individuel), un peu plus du double en aléa faible (soit 51 %), et près de 5 millions d’habitations dans les zones a priori non argileuses (soit 26 %). Au total ce sont donc 74 % des maisons construites en France métropolitaine qui sont potentiellement exposées à des dégradations (fissures, déformations de parois, désintégrations de structure, effondrement…) en raison du phénomène de retrait et gonflement des argiles du sol.
Entre 1982 et 2015, environ un quart des communes françaises ont fait l’objet au moins une fois d’une constatation de l’état de catastrophes naturelles au titre « des dommages causés par les mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols ». Pour certaines cet état de catastrophe naturelle (Cat-Nat) a été arrêté jusqu’à 14 fois sur cette période (33 ans) et on a comptabilisé sur ce même laps de temps un total de 21 450 reconnaissances de communes en ‘catastrophe sécheresse’ ce qui représente le cinquième de tous les états de catastrophes naturelles confondus.
Près de 63 % des sols métropolitains montrent des prédispositions au retrait-gonflement des sols argileux ou marneux. La région Centre-Val de Loire comprend 44 % de son territoire en aléa fort ou moyen, suivie par les régions Île-de-France, Occitanie et Nouvelle-Aquitaine, où le niveau d’aléa fort ou moyen touche entre 25 % et 30 % de leur territoire. Bonne nouvelle pour la Corse et pour la Bretagne, où l’aléa fort ou moyen ne concerne que 2 % de leur surface (en revanche le risque radon y est potentiellement présent).
12 700 € par maison endommagée
Le coût par sinistre sécheresse atteint en moyenne 12 700 € par maison, (3 fois le montant moyen d’indemnisation tous périls confondus) ce qui au total pour la France représente en moyenne 370 millions d’euros par an. Selon l’échelle de gravité des dommages établie en 1999 par le ministère en charge de l’environnement, l’événement le plus important correspond à la catastrophe relative à la sécheresse exceptionnelle de début août 2003 qui a touché près de 4 500 communes.
Cinq communes comptent chacune plus de 15 000 maisons en zone très vulnérable : Bordeaux, Le Mans, Toulouse, Roubaix et Tourcoing. Dans ces deux dernières, l’exposition résulte du fort taux d’urbanisation, renforcé par la part du territoire en aléa fort ou moyen (plus de 98 %).
En conséquence, on comprend pourquoi le tarif des assurances habitation doit être modulé en fonction du type de logement (un immeuble étant moins vulnérable au retrait-gonflement des argiles qu’une maison) et de sa localisation. En outre, comme les phénomènes de sécheresse ne font que s’amplifier aussi bien en termes de fréquence que de durée, davantage de maisons sont chaque année menacées avec pour la plupart des dégâts importants nécessitant des travaux coûteux voire une reconstruction partielle ou totale.
Il apparaît donc primordial de ne pas négliger l’aléa retrait-gonflement des argiles qui est une rubrique de l’État des Risques Naturels Miniers et Technologiques (ERNMT) que tout vendeur ou bailleur d’un bien immobilier doit annexer aux documents de vente ou au bail de location. Cet aléa s’il n’est pas spécifiquement décrit apparaît tout de même dans le signalement de son adoption dans le PPR (Plan de Prévention des Risques) de la commune. Si le PPR a été établi avant la construction de la maison qu’on envisage d’acquérir, il faut pouvoir s’assurer que les techniques de la construction répondent aux impératifs d’une édification dans une zone sensible au retrait-gonflement des sols argileux.
Sources statistiques Développement durable.gouv.fr