L’habitabilité d’un logement est un concept qui englobe de nombreux critères relatifs à la santé, la sécurité et au confort des occupants. La lutte contre le logement indécent, insalubre ou indigne est du ressort de bien trop d’organismes pour que son action soit efficace sur chacun de ces critères. Un logement sain et sécuritaire n’est pas seulement un logement exempt de risques liés à des expositions (amiante et plomb) ou à ses installations (électricité et gaz), mais doit être également un logement confortable (étanchéité, chauffage, surface…) dans une construction solide. Si suffisamment de diagnostics immobiliers couvrent la totalité des aspects liés à la salubrité, la décence et la sécurité d’un logement, le projet de les rassembler en un seul diagnostic habitabilité semble devoir émerger. Le diagnostic habitabilité qui pourrait voir le jour fin 2020 devrait condenser en un seul tous les diagnostics du DDT (Dossier de Diagnostics Techniques) et assurerait la synergie entre tous les organismes depuis le permis de louer jusqu’à l’attribution des aides au logement. Le diagnostic habitabilité ou le Contrôle Technique du logement.
Insalubre, indécent, indigne ou dangereux, la problématique du logement
La problématique du logement notamment lorsqu’il est ancien, englobe des critères multiples allant de la sécurité de l’immeuble jusqu’au confort intérieur des occupants . Les différentes appellations de logement indécent, insalubre, indigne varient en fonction des différents organismes et administrations pour ne qualifier au final qu’un habitat impropre à son usage pour des raisons diverses.
Le tout nouveau rapport Vuilleret propose de traiter la problématique du logement comme un système global depuis l’immeuble (état, vétusté, sécurité et hygiène) jusqu’au logement (sécurité, surface, étanchéité, confort…). Ce même rapport introduit le concept d’un ‘diagnostic habitabilité’ unique qui regrouperait tous les diagnostics immobiliers aujourd’hui obligatoires avant de louer ou de vendre un logement mais également pour pouvoir l’occuper en y percevant des allocations ou aides.
A l’image d’un contrôle technique automobile, ce diagnostic habitabilité serait indispensable pour pouvoir obtenir un permis de louer ou mettre un logement en location pour les bailleurs mais aussi occuper un logement et y percevoir les aides et allocations afférentes. S’il entre en vigueur comme prévu au quatrième trimestre 2020, le diagnostic ‘habitabilité’ devrait être confié en grande partie aux diagnostiqueurs immobiliers qui réalisent déjà la plupart des diagnostics que ce diagnostic habitabilité recouvrira.
Un diagnostic unique synthèse de tous les diagnostics immobiliers
Un logement impropre à l’occupation, qu’il soit déclaré indécent, insalubre, indigne ou dangereux peut l’être en raison de très nombreux critères. Depuis la solidité du bâti jusqu’au confort des occupants, la panoplie actuelle des diagnostics immobiliers est capable de traiter chacun de ces points ou presque.
Pour mémoire, cela commence par le DTG (Diagnostic Technique Global) qui s’attache à l’état du clos et du couvert de la construction, de ses réseaux et canalisations ainsi que de ses équipements de sécurité et va jusqu’au confort des occupants (DPE, infiltrométrie, thermographie) en passant par les aspects sanitaires (diagnostic amiante, CREP, état de décence et salubrité) et sécuritaires (diagnostics gaz et électricité). Si tous les domaines relatifs au logement ou presque sont bien couverts par ces diagnostics immobiliers obligatoires, leur efficacité est limitée aux seuls logements objets de transactions immobilières (location ou vente) et leur contrôle revient à des organismes disparates et échelons divers sans synergie efficace. Ainsi, force est de constater que des ménages occupant des logements impropres à l’usage d’habitation (insalubre, indécent ou indigne) peuvent percevoir des aides publiques qui ne font que nourrir les marchands de sommeil et bailleurs indélicats.
Si l’obligation d’obtenir un permis de louer ou une autorisation de mise en location permet de contrôler l’existence et le bilan des différents diagnostics immobiliers obligatoires et exclut donc du marché les logements dangereux (contenant de l’amiante ou du plomb ou présentant un défaut majeur sur les installations de gaz ou d’électricité), ils ne s’intéressent pas aux problématiques essentielles que sont la sécurité de la construction ou la salubrité de l’immeuble et du logement.
Pour mémoire : Ces derniers points font déjà l’objet de diagnostics immobiliers existants dont l’attestation de surface (Loi Boutin notamment), l’état de décence et de salubrité du logement, ainsi que le DTG (Diagnostic Technique Global). Mais, soit ils ne sont pas tous réellement obligatoires (cas du DTG) ou ne sont que des attestations (cas des diagnostics lois Boutin et Carrez) pour louer ou occuper un logement et y percevoir des allocations et aides au logement, soit lorsqu’ils sont contrôlés ne le sont que par certaines caisses ou administrations sans interactions des données (commune, département, CAF, APL etc…).
Pas de retour attendu d’une classe énergie minimale du DPE
Il est décevant qu’une fois encore on ne puisse voir figurer un seuil minimal de performance énergétique dans les critères de décence d’un logement. Mais le projet de diagnostic habitabilité a le mérite d’en évoquer la problématique alors que les lois ALUR puis ELAN l’avaient purement et simplement négligée ou écartée.
Le rapport Vuilleret évoque le double problème de la fixation d’une classe énergie minimale du DPE pour pouvoir louer un logement et d’un seuil d’interdiction de mise en location des ‘passoires thermiques’ (classes F & G du DPE). «En effet, le critère des étiquettes énergétiques (DPE) et du seul seuil F / G comme référence minimale (et donc de critère empêchant la location du logement) risque de pénaliser fortement le parc de logements anciens et s’avérer inadapté sur le parc construit avant 1949 dans la mesure où les caractéristiques architecturales très hétérogènes ne permettent pas toujours de sortir d’une étiquette F/ G ou alors au prix d’un effort peu raisonnable (diminution de la surface du logement après isolation intérieure (et donc des recettes locatives), coût des travaux supérieurs à la valeur vénale du bien, notamment dans les territoires détendus ou déqualifiés…). Le risque majeur est de voir les investisseurs délaisser le parc ancien pour investir dans le neuf, ce qui paralyserait toute ambition de revalorisation des centres anciens. Aussi, pour l’établissement du critère énergétique, il conviendra de prendre en compte 3 paramètres : la performance énergétique du bien mais aussi la typologie constructive des bâtiments, ainsi que le marché dans lequel le logement se situe ». Source Rapport Vuilleret
La modulation du critère énergétique en fonction de l’immeuble
L’idée de pondérer la classe énergie minimale pour louer un logement selon les paramètres de la construction est sans doute la grande avancée qui permettra de faire figurer le bilan du DPE dans les critères de décence et de salubrité.
Plutôt que de qualifier de ‘passoires thermiques impropres à la location’ tous les logements énergivores (classes F & G du DPE) et exclure ainsi du parc immobilier résidentiel tous les logements anciens, moduler le seuil minimal en fonction de l’ancienneté de la construction permettrait de conserver dans le parc locatif la plupart des logements anciens qui constituent la grande majorité de nos centres urbains. Dès lors que leur performance énergétique est adaptée à l’ancienneté de leur édification, ces logements resteraient disponibles à la location afin de conserver notamment en ville une population indispensable à l’animation et au commerce urbains.
Quant à cette obligation de diagnostic structurel évoquée au lendemain de l’effondrement de l’immeuble de la rue d’Aubagne à Marseille, il serait question de l’intégrer au diagnostic habitabilité lorsque cela est jugé nécessaire en fonction soit de la vétusté de la construction, soit du bilan du DTG (Diagnostic Technique Global). Encore faudrait-il que ce DTG devienne réellement obligatoire et non ‘obligatoire mais sans sanction en cas de non réalisation’.