L’intention du gouvernement d’interdire à la location les logements les plus énergivores ne date pas d’hier mais d’octobre 2018, peu après le départ de M Nicolas Hulot. Il était alors question de créer un bonus-malus énergétique sur la fiscalisation des loyers perçus ou d’interdire de location les logements au DPE (Diagnostic de Performance Énergétique) déplorable soit dans l’une de ses deux dernières classes baptisées F et G. Ce 25 juin devrait être présenté devant l’Assemblée Nationale une proposition de loi visant à améliorer la lutte contre l’habitat insalubre ou dangereux déjà adoptée par le Sénat. Dans cette proposition de loi est prévue entre autres l’interdiction de location des passoires thermiques ainsi que l’extension des pouvoirs des maires en matière d’une police du logement. Faut-il craindre cette interdiction de location ? Ou se méfier d’une telle police du logement ?
L’interdiction de location de quelles passoires thermiques ?
Le projet est louable ou du moins l’était ; celui d’interdire de mettre sur le marché locatif des logements très énergivores. D’une part on évitait ainsi que des ménages modestes aient à payer des factures d’énergie disproportionnées par rapport au confort ressenti, mais on limitait également l’impact environnemental des logements consommant beaucoup trop d’énergie et rejetant bien trop de GES (Gaz à Effet de Serre). Il est certain qu’il vaut mieux dans l’intérêt de la planète mais aussi de tous les contribuables limiter l’impact environnemental de l’habitat plutôt que de distribuer des chèques énergie aidant les plus modestes à payer leur factures de chauffage…
Mais de quelles ‘passoires thermiques’ est-il question ? Des logements en classes F et G (les plus mauvaises) du DPE (Diagnostic de Performance Énergétique) nous répond la proposition de loi. Bien, mais ces ‘passoires thermiques’ sont ‘naturellement’ déjà appelées à disparaître puisque la modification du coefficient d’énergie primaire de l’électricité devrait être bientôt arbitrairement descendu au grand dam des acteurs et usagers de l’immobilier.
Dans les faits, en modifiant ce coefficient d’énergie primaire de l’électricité, il a été choisi de décréter que le chauffage électrique était somme toute pas trop énergivore (moins qu’il y a dix ou quinze ans) et que les fameux convecteurs ‘grille-pain’ un temps bannis de nos logements avaient tout à fait leur place dans un logement BBC (Bâtiment Basse Consommation) conforme à la RT2012 (Réglementation Thermique en vigueur).
A savoir : L’évolution du projet mérite de revoir ce document du Grand Jury RTL du 7 octobre 2018 qui préfigure la genèse de l’interdiction de location des passoires thermiques.
Au résultat, les logements un temps mal classés en termes de DPE en raison de convecteurs électriques archaïques vont voir leur classe de DPE largement améliorée sans rien avoir à modifier en termes d’isolation ou de chauffage. Le tour de passe-passe administratif rendant le chauffage électrique plus acceptable va de fait faire disparaître la grande majorité des ‘passoires thermiques’ (10 % environ du parc immobilier locatif) sans pour cela n’avoir rien d’autre à faire qu’ exécuter un nouveau DPE une fois ce changement de coefficient d’énergie validé. Par contre, pour les locataires, même s’ils n’habiteront plus une ‘passoire thermique’ grâce à la proposition de loi AMELI, la hausse constante et déjà une nouvelle fois programmée du coût de l’électricité va continuer de leur faire payer au prix fort chauffage et ECS (Eau Chaude Sanitaire) électriques.
La location des logements mal isolés bientôt interdite ?
C’est le titre d’un article de Capital traitant de cette interdiction de mise en location des passoires énergétiques. Malheureusement ce n’est pas du tout ce qu’il est envisagé puisque le niveau d’isolation des logements n’est jamais évoqué dans la proposition de loi. On sait qu’un logement pas très bien isolé peut se retrouver mieux classé dans son DPE qu’un logement bien isolé mais mal orienté, mal construit, mal chauffé et/ou rafraîchi sans notamment recours aux énergies renouvelables.
Il aurait fallu pour que cela soit effectif que les critères de décence d’un logement prennent en compte l’efficacité énergétique (classe du DPE) et/ou son niveau d’isolation thermique plutôt que se limiter à ‘une étanchéité à l’air suffisante’ ainsi que le stipule actuellement la législation. On devrait y arriver peut-être une fois que le DPE sera devenu opposable c’est à dire l’an prochain en 2020. A suivre…